Dessance
Nouveau concept de Philippe Baranes, par ailleurs propriétaire du controversé Braisenville, qui offre (si l’on peut dire) aux becs sucrés et aux fashion victims culinaires un « bar à desserts » à forte tendance gastronomique avec Christophe Boucher, ex chef pâtissier du Grand Véfour et de Ledoyen, passé aussi chez Eric Guérin. Il décline des créations exclusivement sucrées mais sur une variation de tonalités, de textures et de saveurs aptes à étonner les amateurs d’alliances improbables, adhérant à tout concept éphémère de peur de passer pour des out of touch. Pari réussi car, comme le décor tout en longueur d’un designer sûrement réputé, les plats/desserts sont pour le moins déroutants. Baranes lui-même parle de « desserts innovants », « d’expérience gastronomique », « d’accords détonants », nous sommes donc bien dans un monde hors du temps, ouvertement expérimental, dont le surprenant se doit d’être le premier critère.
Christophe Boucher compose ses créations à partir de fruits, légumes, baies, végétaux et herbes de saison. Le menu « Carte Blanche », sur quatre plats/desserts conçus par le chef décline « des saveurs rafraîchissantes, portées sur le fruit, puis sur le végétal, et finissant sur le chocolat et la vanille pour des saveurs plus connues. « J’utilise d’abord le sucre naturel du produit, puis le sucre comme un assaisonnement plutôt qu’une base. » Le meilleur exemple du travail du chef est bien dans l’Omelette Norvégienne, classique des classiques d’un autre âge, ringardisé soigneusement au fil des décennies, qui ressort aujourd’hui, mais… « je fume les blancs à la sève de pin, je rajoute un caramel au beurre salé car je suis breton, je garde la base de glace vanille, flambage non au rhum mais au whisky tourbé qui prolonge la saveur fumée du pin. » Résultat intéressant, goûteux, paradoxalement un peu lourd dans ce monde du léger et de l’aérien à cause du caramel beurre salé.
Pour le reste, un excellent concentré de poire, avec crème de cerfeuil racine, et sorbet au yaourt grec, puis un mariage étonnant sinon surréaliste, comme la rencontre fortuite d’un chapeau et d’un fer à repasser, entre la mandarine et un fromage blanc de brebis. Les propositions, sinon les impositions, d’accords des boissons sont gérées par Boris Bielous qui prend son rôle très au sérieux. Belle réussite du choix d’un whisky Nikka Yoichi Mizuwari 15 ans d’âge (9 €) sur l’omelette norvégienne et du Riesling Albert Mann 2012 (8 €) sur la poire. Café éthiopien pur et aérien en final avec quelques mignardises dont un croquant au sésame démentiel.
Du travail précis, technique, d’une belle froideur mais manquant de chaleur ou de belle humeur que donne normalement la pâtisserie. Cerise sur le gâteau, si j’ose dire, ce n’est pas donné.
Dessance
74, rue des Archives
75003 Paris
Tél : 01 42 77 23 62
M° : Arts & Métiers
Fermé lundi & mardi
15h – 23h, du mercredi au vendredi en continu
12h minuit samedi & dimanche, en continu
Dessert à la carte : 19 €
Menu « Carte Blanche » de 4 desserts : 36 € en individuel
44 € pour deux (à partager) |