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Restaurants Paris
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Excellente nouvelle. Thierry Marx travaille sur et dans la mesure. Il en a terminé avec la démesure. Exit les expériences de laboratoire de Cordeillan-Bages, le saucisson virtuel et autre quiche lorraine liquide. L’homme semble assagi, plutôt serein malgré la charge qui pèse sur ses (pas vraiment frêles) épaules dans la gestion de toute la restauration du Mandarin Oriental. À partir de ses bases classiques qu’il possède parfaitement, Thierry Marx sait aujourd’hui utiliser sa créativité, ses idées hors du commun, ses alliances et ses jeux de textures souvent fulgurants avec un sens de l’équilibre qui laisse ébloui celui qui n’a jamais goûté sa cuisine et rassuré celui qui le connaît depuis longtemps. Naissance, renaissance, retour sur des chemins plus balisés par un groupe international ? Peu importe, un grand chef est de retour parmi nous et l’on va se régaler.
Un Billecart-Salmon Cuvée Sous Bois à la coupe, excellente sélection de la compétente sommelière Marie Mignot, permet d’oublier un instant le décor de navette spatiale cocoonée ou de cantine de clinique pour milliardaires, de toute façon hors du temps et à contre-temps, mais autant le décor ne paraît pas fini (volontairement bien sûr, designer oblige) autant la cuisine du chef paraît aboutie. Il vaut mieux ça que le contraire !
Onze propositions du jour sur carte parchemin. Neuf plats pour le menu dégustation, cinq plats pour le menu « déjeuner ». La lecture vous plonge d’emblée dans le nouveau monde de Marx. Étonnement, curiosité, envie, sont les sensations contradictoires et complémentaires qui saisissent en découvrant l’énoncé court et direct des plats. Patate douce structure et déstructure : la patate en trois manières dont l’alliance avec de l’orange tout en délicate subtilité. On a envie de rester avec elle, mais déjà il faut avaler les deux autres. Zapping, toujours ! Œuf, cèpes : l’intitulé est bref mais on y trouve aussi du pain à l’épeautre, une goutte de balsamique pour rehausser les cèpes, et une légère crème de céleri pour agrémenter l’ensemble. Bon et intéressant.
Langoustine, melon rôti sans cuisson : du Thierry Marx pur créatif dans un subtil accord avec un troisième larron, un oignon cru au goût de cuit. Très bon et sophistiqué. Semi-Pris de coquillages, longuet Caviar (de Sologne) : un festival Marxien ! Jeu de textures (gelée, mousse, pain croustillant beurré au caviar) pour un plat magnifique sinon génial. Un futur grand classique du chef ? Risotto de soja, truffe noire : le voilà le classique de Marx depuis un bout de temps, mais qui reste toujours un petit chef d’œuvre d’équilibre subtil et de goûts marqués avec l’émulsion au mascarpone et parmesan qui enrobe tendrement l’ensemble.
Bar/pruneau/Balsamique : une idée géniale sur des alliances improbables mais qui laissent pantois devant la réalisation, la complexité et le goûteux de ce bar macéré dans du pruneau puis grillé à la flamme. Un chef d’oeuvre ! Volaille de Bresse en deux cuissons, amandes et girolles : toujours ce problème des deux cuissons (la tarte à la crème du moment) qui donne souvent un blanc fade et mou (c’est le cas ici) et de plus la construction est un peu compliquée. Un beau plat visuel mais qui ne donne pas grand-chose. Figue pochée, Banyuls, sorbet gingembre : confirmation du talent exceptionnel du pâtissier du chef, Pierre Mathieu, pour un dessert doux et soyeux avec le petit coup de griffe du gingembre.
Une cuisine gastronomique au sens noble du terme, un chef qui monte doucement au sommet de son talent et qui le sait, des plats que l’on ne voit nulle part ailleurs, ni à Paris chez les petits Marx ni à Copenhague, chez les petits Ferran… Il faut casser ses économies ou le reste et découvrir cette cuisine étonnante mais si délicate. Le décor plombe, mais la cuisine vous transforme en plume au vent. Les étoiles vont arriver et c’est déjà mérité. Le bien connu et talentueux David Bureau dirige la salle et gère une carte des vins splendide où le choix de vins au verre proposé pour le menu dégustation est plus que parfait. Des accords au millimètre et des découvertes magnifiques dont un Meursault de Jean-Marc Boillot resplendissant. Grâce au talent des autres, on apprend tous les jours et c’est bien comme ça.
Cinq questions à Thierry Marx
Comment s’organisent les menus au Sur Mesure ?
Ils changent tous les jours mais à partir de maintenant je vais refaire ce que je faisais déjà à Cordeillan-Bages, à savoir un certain nombre de plats en proposition sur une carte et les clients composeront eux-mêmes leur menu en prenant ce qu’ils veulent, soit deux entrées et deux poissons, soit autre chose en choisissant 6, 9 ou 12 plats. On enclenche donc la version définitive car nous sommes prêts. D’autre part, je gère le Camélia et le Sur Mesure sans conflit car j’ai connu la tradition et j’aime l’innovation. J’aime surtout oser, comme ouvrir une pâtisserie dans un palace parisien comme le Mandarin Oriental.
Peut-on dire que l’on retrouve un Thierry Marx assagi et réfléchi au Mandarin Oriental ?
Je suis assez d’accord et j’aime le terme « assagi ». J’ai fait ma révolution et je vois plus clair et plus loin dans mon tunnel personnel. Je fais une cuisine qui me convient et je ne veux plus m’enfermer dans l’hyper moderne. J’ai trouvé de la sérénité et j’écris une cuisine différente des autres donc je n’ai plus besoin d’excentricités superflues. Repartir à zéro à Paris est très énergisant et j’ai l’impression de rajeunir de quinze ans !
Pourquoi vous ne servez pas de pain ? On se croirait à Copenhague chez Redzépi et sa bande !
Pour Copenhague, je ne savais pas mais le pain et le beurre dans les restaurants finissaient par m’agacer terriblement. Je suis un passionné de pain, mais je trouve qu’il alourdit un repas. Je fais juste un petit complément de pain sans gluten pour accompagner certains plats. Au Camélia, je travaille avec Bernard Ganachaud.
Un plat emblématique de Thierry Marx ?
Le risotto de soja et truffes. Il me correspond totalement. Le soja m’intriguait beaucoup en Asie et j’ai voulu le marier avec des produits typiquement français comme la truffe ou le cèpe. Il est onctueux et vaporeux. Je vais refaire bientôt mon bœuf fumé aux sarments qui regroupe des produits du terroir et mon sens de l’innovation.
Trois personnes qui vous ont marqué ?
Claude Deligne, chef du Taillevent, qui m’a embauché sans regarder mon CV. Un chef majeur qui a tenu plus de vingt ans avec trois étoiles Michelin et dont on n’a pas beaucoup parlé à l’époque. Une valeur sûre du patrimoine culinaire français. Joël Robuchon, bien sûr. Bernard Loiseau, bien que je n’ai jamais travaillé avec lui mais qui un jour m’a fait asseoir à sa table sans me connaître et qui m’a fait goûter six ou sept plats de la saga Loiseau. Je n’ai jamais oublié ce moment ni le verbe de cet homme. Il m’a appris qu’il faut faire ce que l’on a envie de faire et l’assumer.
Sur Mesure
251, rue Saint-Honoré
75001 Paris
Tél : 01 70 98 73 33
www.mandarinoriental.com/paris
Fermé dimanche et lundi
Voiturier
Menu « déjeuner » : 75 € (5plats)
Dégustation : 180 € (9 plats)
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